Les trois exils :toujours dupes
Benjamin Stora, dont la famille est originaire de Khenchela, ville de l'Est algérien, a retrouvé les jalons de son histoire familiale. Voyageant entre mémoire et histoire, quête personnelle et enquête historique, il reconstitue les trois exils qui ont marqué le destin des juifs d'Algérie. En moins d'un siècle en effet, ils sont sortis par trois fois de ce qui était jusque là leur univers familier. Ils se sont éloignés de leur vie en terre d'islam quand le décret Crémieux de 1870, faisant d'eux des citoyens français, les a mis sur la voie de l'assimilation. Ils ont été rejetés hors de la communauté française de 1940 à 1943 avec les loi de Vichy. Et ils ont quitté les rives algériennes avec l'exode de 1962. A travers cet essai historique sensible et rigoureux, enrichi de documents inédits, on décourve l'originalité de ce judaïsme algérien à la fois passionnément attaché à la république française et profondément pétri de traditions religieuses, mais aussi la complexité et les ambiguïtés des relations entre juifs et musulmans. Et l'on comprend mieux comment, dans les tensions actuelles, quand la crainte de l'islamisme et montée de l'antisémitisme se conjuguent, revient une " mémoire longue de l'inquiétude ".
1er novembre 1954, l’Algérie s’embrase. En tant que ministre de l’Intérieur, François Mitterrand se retrouve au cœur de la tourmente. Pas question pour lui, ni d’ailleurs pour la majeure partie de la classe politique, d’envisager l’indépendance de ces départements français. Il tente en revanche d’imposer des réformes sociales. Devenu ministre de la Justice du gouvernement socialiste de Guy Mollet, il reste un homme d’ordre, fidèle à la politique répressive qui s’installe. La guillotine en devient une des armes. Quand François Mitterrand quitte la place Vendôme à la fin du mois de mai 1957, quarante-cinq condamnés à mort ont été guillotinés en seize mois.
Comment celui qui, vingt-cinq ans plus tard, abolira la peine de mort peut-il accepter l’exécution des militants algériens ?
Comment expliquer le silence autour de cet épisode noir de la carrière du futur président de la République ?
Ce livre montre que François Mitterrand n’a pas été au rendez-vous de la décolonisation algérienne. Nourri de documents et de témoignages inédits, il est le fruit d’un long et méticuleux travail mené par un journaliste et un historien.
La première édition de La Question, d'Henri Alleg fut achevée d'imprimer le 12 février 1958. Des journaux qui avaient signalé l'importance du texte furent saisis. Quatre
semaines plus tard, le jeudi 27 mars 1958 dans l'après-midi, les hommes du commissaire divisionnaire Mathieu, agissant sur commission rogatoire du commandant Giraud, juge d'instruction auprès du tribunal des forces armées de Paris, saisirent une partie de la septième réédition de La Question. Le récit d'Alleg a été perçu aussitôt comme emblématique par sa brièveté même, son style nu, sa sécheresse de procès-verbal qui dénonçait nommément les tortionnaires sous des initiales qui ne trompaient personne. Sa tension interne de cri maîtrisé a rendu celui-ci d'autant plus insupportable : l'horreur était dite sur le ton des classiques. La Question fut un météorite dont l'impact fit tressaillir des consciences bien au-delà des " chers professeurs ", des intellectuels et des militants. A l'instar de J'accuse, ce livre minuscule a cheminé longtemps.
Avec la fin de ce qu'on n'appelait pas encore la guerre d'Algérie, l'étouffoir d'une amnistie généralisée s'est abattu sur les terribles exactions commises par des militaires français au nom de la "pacification". Ce n'est que près de quarante ans plus tard qu'une longue série de polémiques a provoqué l'irruption dans le débat public d'une période aux trois-quarts enfouie dans l'inconscient collectif. La Découverte a opportunément réédité ce petit recueil, augmenté d'une nouvelle préface qui constitue à elle seule un véritable essai historiographique. On le doit à l'un des derniers grands intellectuels engagés encore vivants, qui livra précisément ses premiers combats contre la torture en Algérie.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 9 autres membres